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Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 9-10.djvu/379

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joie, qu’elle a besoin de s’épancher ; et vous ne pouvez vous imaginer ce que sont les épanchements d’une si belle âme… Un peu de patience… et vous en jugerez…

Puis Adrienne ajouta le plus naturellement du monde :

— Je ne sais pourquoi, à propos de ces épanchements de ma chère tante, car cela y a peu de rapport, je me souviens de ce que vous me disiez, mon cousin, de certaines espèces de vipères de votre pays : souvent, dans une morsure impuissante, elles se brisent les dents qui filtrent le venin, et l’absorbent ainsi mortellement, de sorte qu’elles sont elles-mêmes victimes du poison qu’elles distillent… Voyons, ma chère tante, vous qui avez un si bon, un si noble cœur… je suis sûre que vous vous intéressez tendrement à ces pauvres vipères…

La dévote jeta un regard implacable à sa nièce, et reprit d’une voix altérée :

— Je ne vois pas beaucoup le but de cette histoire naturelle ; et vous, prince ?

Djalma ne répondit pas ; accoudé à la cheminée, il jetait un regard de plus en plus sombre et pénétrant sur la princesse ; une haine involontaire pour cette femme lui montait au cœur.

— Ah ! ma chère tante, reprit Adrienne d’un