Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 9-10.djvu/540

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nourricier est trois fois saint, et c’est encore servir, glorifier Dieu que de féconder la terre qu’il a créée. Dagobert, lorsque ses chagrins se sont apaisés, a retrempé sa vigueur à cette vie agreste et salubre ; dans son exil en Sibérie, il était déjà devenu presque laboureur. Enfin, ma bonne mère adoptive, l’excellente femme d’Agricol, la Mayeux, se sont partagé les travaux intérieurs, et Dieu a béni cette pauvre petite colonie de gens, hélas ! bien éprouvés par le malheur, qui ont demandé à la solitude et aux rudes travaux des champs une vie paisible, laborieuse, innocente, et l’oubli de grands chagrins.

« Quelquefois vous avez pu dans nos veillées d’hiver apprécier l’esprit si délicat, si charmant, de la douce Mayeux, la rare intelligence poétique d’Agricol, l’admirable sentiment maternel de sa mère, le sens parfait de son père, le naturel gracieux et exquis d’Angèle ; aussi dites, mon ami, si jamais l’on a pu réunir tant d’éléments d’adorable intimité. Que de longues soirées d’hiver nous avons ainsi passées autour d’un foyer de sarments pétillants, lisant tour à tour ou commentant ces quelques livres toujours nouveaux, impérissables, divins, qui réchauffent toujours le cœur, agrandissent toujours l’âme !… Que de causeries attachantes,