Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 9-10.djvu/66

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père d’Aigrigny avec autant de dépit que de surprise.

Et d’un geste il fit signe au domestique de sortir ; puis cachant la vive contrariété qu’il ressentait, il dit à M. Hardy :

— Ce digne artisan a bien hâte de vous voir, mon cher fils, car il devance de plus de deux heures le moment de l’entrevue… Voyons, il en est temps encore… voulez-vous le recevoir ?…

— Mais, mon père, dit M. Hardy avec une sorte d’irritation, vous voyez dans quel état de faiblesse je suis ;… ayez donc pitié de moi… Je vous en supplie, du calme ;… je vous le répète, quand ce serait le calme de la tombe ; mais, pour l’amour du ciel… du calme…

— Vous jouirez un jour de la paix éternelle des élus, mon cher fils, dit affectueusement le père d’Aigrigny, car vos larmes et vos misères sont agréables au Seigneur.

Ce disant, il sortit.

M. Hardy, resté seul, joignit les mains avec désespoir, et, fondant en larmes, s’écria en se laissant glisser de son fauteuil à genoux :

— Ô mon Dieu !… mon Dieu ! retirez-moi de ce monde… je suis trop malheureux.

Puis, courbant le front sur le siége de son