Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 9-10.djvu/77

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soumis humblement à cette Église ; c’est dans les larmes, dans l’isolement, dans la mortification, que je dois expier mes fautes, oui… dans l’espoir que ce Dieu vengeur me les pardonnera un jour… et que mes souffrances ne seront pas du moins perdues pour ceux qui sont encore plus coupables que moi.

Agricol ne trouva pas un mot à répondre ; il contemplait M. Hardy avec une frayeur muette ; à mesure qu’il l’entendait prononcer ces désolantes banalités d’une voix épuisée, à mesure qu’il examinait cette physionomie abattue, il se demandait avec un secret effroi par quelle fascination ces prêtres, exploitant les chagrins et l’affaiblissement moral de ce malheureux, étaient parvenus à isoler de tout et de tous, à stériliser, à annihiler ainsi une des plus généreuses intelligences, un des esprits les plus bienfaisants, les plus éclairés qui se fussent jamais voués au bonheur de l’espèce humaine.

La stupeur du forgeron était si profonde, qu’il ne se sentait ni le courage ni la volonté de continuer une discussion d’autant plus poignante pour lui qu’à chaque mot son regard plongeait davantage dans l’abîme de désolation incurable où les révérends pères avaient plongé M. Hardy.

Celui-ci, de son côté, retombant dans sa morne