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Page:Sue - Les Fils de famille (1856).djvu/327

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— Ces cannes à pomme de lapis-lazuli, d’onyx ou d’émail sont des mieux portées par nos élégants, et M. Dumirail ne saurait s’en passer.

— Lorsque monsieur aura terminé ses achats, — dit à son tour le maquignon, — je ferai ôter leur couverture aux chevaux de selle que je lui amène, et je défie que l’on trouve aux Champs-Élysées deux hacks ayant plus de sang et plus de chic. Il n’y a que le cheval entier de l’ambassadeur d’Angleterre qui puisse être comparé au cheval bai doré que monsieur va voir et qui sera l’ornement de ses écuries.

— J’allais envoyer à M. le comte de Bailleul, à son château de Bailleul, un complet assortiment d’habits, — dit le tailleur ; — M. le comte a l’avantage d’avoir une aussi riche taille que celle de monsieur, pour qui les habits semblent avoir été coupés ; il se trouvera ainsi provisoirement fourni. Ma foi ! tant pis pour M. le comte, il attendra !

— Je prendrai la liberté d’affirmer à monsieur que ces habits lui iront aussi bien que s’ils étaient confectionnés pour lui, — ajouta respectueusement Simon, le valet de chambre. — J’ai l’honneur de connaître de vue M. le comte de Bailleul, et sa taille est la même que celle de monsieur, quoique celle de monsieur soit beaucoup mieux prise.

Maurice, séduit par ce concert de flatteuses paroles, ébloui par l’aspect de tant d’objets d’une élégance d’excellent goût, se préparait à acheter tout ce qu’on lui offrait, afin de s’épargner l’embarras du choix, lorsque soudain il vit entrer sa mère, madame Dumirail.


LXV


Après une nuit d’insomnie passée dans d’inexprimables angoisses et dans les suppositions les plus sinistres sur la cause de l’absence prolongée de Maurice, madame Dumirail avait épié son retour. Dès l’aube et accoudée à sa fenêtre, jetant au loin des regards