chard, que, si étrange ou si frivole que vous semble ma question, elle peut intéresser votre honneur.
— Mon honneur ? — répéta M. d’Otremont avec une sorte de stupeur, — mon honneur ?
— Je vous le jure…
— Je sais la valeur du serment d’un homme tel que vous, mon cher Delmare, je vous répondrai donc loyalement. J’ai eu un goût très-vif pour madame de Hansfeld, et je lui ai fait la cour…
— Avant qu’elle connût Maurice Dumirail ?
— Oui, — répondit d’Otremont en rougissant, car il se souvenait du prix homicide auquel Antoinette avait mis ses bonnes grâces, et il se disait que, fatalement, presque malgré lui, il allait peut-être accomplir le vœu de cette dangereuse créature.
La rougeur, l’embarras de M. d’Otremont, n’échappèrent pas à Charles Delmare ; ses soupçons croissants devinrent presque une certitude.
Il reprit, en continuant d’observer attentivement son interlocuteur :
— Une dernière question, mon cher Richard, et, je vous le jure, celle-là, autant et plus que l’autre peut-être, intéresse votre honneur : Madame de Hansfeld est-elle pour quelque chose dans la cause de votre duel avec Maurice Dumirail ?
Cette demande blessa au vif M. d’Otremont, en ce qu’elle lui, rappelait de nouveau, et cette fois de la manière la plus précise, les projets homicides de madame de Hansfeld, contre lesquels il s’était d’abord révolté sincèrement, et que, pour obéir au point d’honneur, il allait néanmoins servir. Aussi répondit-il avec un sourire forcé :
— Sans reproche, mon cher Delmare, j’espère que cette question sera la dernière à laquelle j’aurai à répondre… au nom de l’intérêt de mon honneur, dites-vous ?
— Oui, — reprit gravement Charles Delmare, — oui, au nom de l’intérêt de votre honneur… répondez-moi, de grâce !
— Soit. Eh bien ! madame de Hansfeld assistait hier au souper pendant lequel j’ai été grossièrement insulté par M. Maurice Dumirail ; elle me l’avait présenté, il y a quelques jours, réclamant pour lui mes bons offices, afin de le faire admettre à mon club. J’avais, malgré la différence de nos âges et mon peu de goût pour les nouvelles relations, j’avais accueilli à merveille ce jeune homme ; son ingénuité, la franchise de ses manières, m’inspiraient assez de sympathie. Enfin, le souper que je donnai hier avait principalement pour but de présenter M. Maurice Dumirail aux mem-