étreinte plus étroite encore, — nous séparer ! jamais !… Je défie le sort… je défie l’avenir !… Qu’ils viennent donc, tes parents, qu’ils osent donc essayer de t’enlever de mes bras, toi, mon amant, mon trésor, ma vie, mon âme !
— Ah ! tu m’aimes aussi passionnément que je t’aime !… — s’écria Maurice répondant à l’étreinte d’Antoinette. — Eh ! que m’importe ma famille ! Est-ce que sa tendresse m’a jamais causé l’enivrement où ton amour me plonge ? Mes parents !… eh ! leur affection a eu son temps. Je suis homme maintenant !…
— Tiens, Maurice bien-aimé, c’est cruel, ce que je vais dire là ! — reprit madame de Hansfeld attachant son regard noir et profond sur le jeune homme : — tes parents, maintenant, je les hais à la mort !…
— Ils t’ont calomniée si indignement, que je n’ai plus le droit de les défendre, — répondit Maurice en baissant les yeux et la voix altérée par le remords involontaire de ses exécrables paroles ; — tu leur rends haine pour haine.
— Ah ! ma haine contre eux ne vient pas seulement du mal qu’ils m’ont fait, de celui qu’ils veulent me faire, qu’ils me feront sans doute : je les hais de leur dureté, de leur égoïsme envers toi ; je les hais de la sujétion humiliante dans laquelle leur tyrannie te tient à ton âge, je les hais de leur révoltante avarice, eux, plus que millionnaires, qui te refusent ce qui, dans ta position de fortune, est le strict nécessaire ! Est-ce qu’en fait leur fortune ne t’est pas destinée ? ne t’appartiendra-t-elle pas un jour ? C’est ton bien, c’est donc de leur part méchanceté réfléchie que te refuser l’argent nécessaire à goûter les plaisirs de ton âge. Mais non, renfermés dans leur odieux égoïsme, ils se plaisent à te priver des plaisirs qu’ils ne peuvent éprouver ; leur sordide espoir est de ne te laisser leur opulent héritage qu’alors que tu seras trop vieux pour en jouir. Enfin, tes parents, je les hais surtout dans leur jalousie stupide et méchante à l’endroit de toute autre affection que la leur ! Ainsi veulent-ils nous désunir, nous, nous, si bien faits l’un pour l’autre ; nous, de qui la vie eût été si adorablement heureuse sans leurs persécutions !
— Ah ! ce n’est que trop vrai, Antoinette !
— Loin de moi, grand Dieu ! toute pensée qui serait presque un crime ; mais enfin, en songeant à tout ce que nous a déjà fait souffrir ta famille et aux chagrins qu’elle nous causera sans doute encore, il m’est permis, je crois, de regretter pour toi que, comme tant d’autres, tu ne sois pas resté orphelin dans ton enfance, et