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Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 1.djvu/100

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rent leur cheval, et s’éloignèrent dans une direction opposée à celle de l’attroupement.

Gildas avait suivi des yeux ce nouveau mouvement de la foule avec une inquiétude croissante ; il vit tout à coup Pradeline sortir du café où elle était entrée, et se diriger vers le magasin, tenant une lettre à la main.

— Quelle enragée !… elle vient de m’écrire ! — pensa Gildas. — La malheureuse m’apporte sa lettre !… Une déclaration !… Je suis déshonoré aux yeux de mes patrons !…

De sorte que Gildas éperdu referma vivement la porte du magasin, lui donna un tour de clef et se tint coi auprès du comptoir.

— Eh bien, — lui dit madame Lebrenn, — pourquoi fermez-vous ainsi cette porte, Gildas ?

— Madame, c’est plus prudent. Je viens de voir venir là-bas une bande d’hommes… dont la mine effrayante…

— Allons, Gildas, vous perdez la tête ! Ouvrez cette porte.

— Mais, madame…

— Faites ce que je vous dis… Tenez, justement, il y a quelqu’un qui essaye d’entrer… Ouvrez donc cette porte…

— C’est cette enragée avec sa lettre, — pensa Gildas plus mort que vif. — Ah ! pourquoi ai-je quitté ma tranquille petite ville d’Auray ?…

Et il ouvrit la porte avec un grand battement de cœur ; mais au lieu de voir apparaître la jeune fille avec sa lettre, il se trouva en face de M. Lebrenn et de son fils.