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Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 1.djvu/216

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CHAPITRE III.


Combat de Julyan et d’Armel. — Mamm’Margarid abaisse trop tard sa quenouille. — Agonie d’Armel. — Étranges commissions dont on charge le mourant. — Le remplaçant. — La dette payée outre-tombe par Rabouzigued. — Armel meurt désolé de n’avoir pas entendu les récits du voyageur. — Julyan promet à Armel d’aller les lui raconter ailleurs. — L’étranger commence ses récits. — Histoire d’Albrège, la Gauloise des bords du Rhin. — Margarid raconte à son tour l’histoire de son aïeule Siomara et d’un officier romain aussi débauché qu’avaricieux. — L’étranger fait de sévères reproches à Joel sur son amour pour les contes, et lui dit que le moment est venu de prendre la lance et l’épée.




La nombreuse famille de Joel, rangée en demi-cercle à l’extrémité de la grande salle, attendait la lutte avec impatience, tandis que Mamm’Margarid, ayant l’étranger à sa droite, Joel à sa gauche, et deux des plus petits enfants sur ses genoux, levant sa quenouille, donna le signal du combat, de même qu’en l’abaissant elle devait donner le signal de le cesser.

Julyan et Armel se mirent nus jusqu’à la ceinture ; ne gardant que leurs braies, ils se serrèrent de nouveau la main, se passèrent au bras gauche un bouclier de bois, recouvert de peau de veau marin, s’armèrent d’un lourd sabre de cuivre, et fondirent l’un sur l’autre avec impétuosité, de plus en plus animés par la présence de l’étranger, aux yeux duquel ils étaient jaloux de faire valoir leur adresse et leur courage. L’hôte de Joel semblait plus content qu’aucun autre de cette annonce de combat, et sa figure paraissait à tous encore plus mâle et plus fière.

Julyan et Armel étaient aux prises : leurs yeux ne brillaient pas de