Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 10.djvu/162

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

obtenu des richesses considérables de mon galant. Puis-je jouir de ces biens en sécurité de conscience ?

« — Ma fille (répondrai-je), les biens acquis par l’adultère ont, il est vrai, une source illégitime ; mais, néanmoins, leur possession est légitime, puisque aucune loi ne contrarie cette possession. Donc, jouissez en paix de vos biens, ma fille[1]. »

— J’ai volé une somme considérable, je m’en accuse ?

« — Mon fils (répondrai-je), il est criminel de voler, à moins cependant que l’on n’y soit contraint par une extrême nécessité, moins encore, par des motifs graves[2]. »

— Je suis riche, mais peu ou point aumônier ; je m’en accuse ?

« — Mon fils (répondrai-je), la charité envers son prochain est un devoir chrétien ; cependant, si le superflu vous est nécessité, vous ne péchez point en ne vous dépouillant pas de ce qui est à vos yeux le nécessaire[3]. »

— Je convoitais un héritage ; je m’accuse d’avoir empoisonné celui de qui je devais hériter. Puis-je conserver ces biens ?

« — Mon fils (répondrai-je), la possession des biens acquis par voies honteuses, même par le meurtre, est légitime, en tant que possession ; vous pouvez donc les conserver[4]. »

— L’on m’a déféré le serment ; ma conscience me défend le parjure, et mon intérêt me l’ordonne. Vous êtes mon confesseur, je vous consulte en cette occasion ?

« — Vous pouvez, mon fils, concilier votre intérêt et votre conscience ; voici comme : On vous demandera, je suppose : — Affirmez-vous par serment n’avoir point commis tel acte ? — vous répondez tout haut : — Je jure devant Dieu et devant les hommes que je n’ai pas commis cet acte… (et vous ajoutez mentalement) ce jour-là… — ou bien encore on vous dit : — Jurez-vous de ne jamais faire telle chose ? — vous répondez : Je le jure… (et

  1. Ibid., p. 111.
  2. Ibid., p. 110.
  3. Ibid., p. 91.
  4. Ibid., p. 111.