Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 10.djvu/17

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petite condition, lesquelles suivaient ledit roi Charles partout où il allait. Madame de Villequier se fit céder par ses parents Blanche de Rebreuve, pour la bailler au roi, bien que celle-ci protestât en pleurant qu’elle aurait mieux aimé conserver sa vertu, dût-elle seulement vivre de pain et d’eau claire ; mais bientôt elle se consola et partagea les faveurs du roi avec la dame de Villequier et ses demoiselles suivantes. »

Le même Jacques Duclerc (Liv. XXIX, p. 222), parlant des mœurs des prêtres de son temps, disait :

« … Il est vrai d’assurer que le plus grand nombre des gens d’église, en ce temps-ci et auparavant, étaient si dissolus au péché de luxure et avarice, ambitions et délices mondaines, que ce serait pitié à les mettre par écrit ; et aussi bien les grands comme prélats et autres que les pauvres prêtres et ordres mendiants. Ces désordres du clergé irritèrent profondément les gens de bien ; mais l’Inquisition veillait, et tous ceux qui osaient hautement blâmer ces scandales étaient accusés d’hérésie, d’affiliation aux Vaudois, descendants des Albigeois, puis arrêtés et soumis à des tortures épouvantables, jusqu’à ce qu’ils eussent confessé leur hérésie. La plupart confessaient par terreur ; grand nombre de ces malheureux furent suppliciés à Arras en 1460. L’un d’entre eux, échevin d’Arras, l’un des hommes les plus honorables de la ville, après avoir été souventefois torturé, déclara, au moment de périr sur l’échafaud (toujours selon Jacques Duclerc, liv. XIV, p. 67), que tous ceux qu’il avait accusé d’être Vaudois, dont aucuns étaient là présents, échevins et autres, ne l’étaient point ; il ajouta que ce qu’il avait dit, écrit et confessé là-dessus, il l’avait dit, écrit ou confessé par la force de la torture, et qu’autant de gens qu’il connaissait, il les avait tous nommés, et si plus il en eût connu, plus il en aurait nommés, pour faire cesser la torture qui brisait ses membres tandis que l’on approchait de la plante de ses pieds des flambeaux de cire bien allumés et bien ardents. »