Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 10.djvu/185

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— Oh !… sortez !

— Parricide ! lever ce fer sur moi… ta mère !…

— Tous mes crimes sont absous !… Inceste… parricide… tout est absous !… Sortez, ou je vous tue !…

À peine ces épouvantables paroles sont-elles prononcées, que le bruit de pas nombreux et hâtés parvient dans la salle basse à travers la porte laissée ouverte par Brigitte ; presque aussitôt une troupe d’archets du guet, commandés par un sergent d’armes et guidés par un homme vêtu d’un frac noir, à capuchon rabattu, s’arrêtent et se groupent devant la demeure de Christian Lebrenn. Le franc-taupin les a rencontrés à peu de distance du pont au Change ; quelques mots échangés entre les soldats l’ont mis sur la voie de leur mission. Inquiet et rebroussant chemin, il les a suivi de loin. Le sergent du guet entre au moment où Hervé venait de menacer la vie de sa mère…

— Christian Lebrenn demeure ici ? — dit le soldat. — Où est-il ?

Brigitte, bouleversée, ne peut répondre ; Hêna trouve la force de se relever, de courir vers Brigitte et de se jeter dans ses bras. Hervé laisse tomber à ses pieds le fer dont il s’est armé, reste immobile, farouche, les bras croisés sur sa poitrine. L’homme au visage masqué par la cagoule de son froc (hélas ! cet homme était Jean Lefèvre, l’un des disciples de Loyola) dit quelques mots à l’oreille du sergent du guet ; celui-ci s’adressant de nouveau à Brigitte d’une voix rude :

— Répondez… C’est ici la demeure de Christian Lebrenn, artisan d’imprimerie ?

— Oui, — réponds Brigitte, oubliant un moment les horreurs dont elle frémit encore ; et très-alarmée de la visite de ces soldats, elle reprend : — Mon mari est absent.

— Vous êtes la femme de Christian Lebrenn ? — reprend le soldat ; puis indiquant tour à tour du geste Hêna et Hervé : — Ce jeune homme et cette jeune fille sont vos enfants ?

— Oui.