Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 10.djvu/212

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Notre résignation n’a-t-elle pas assez duré ? n’augmente-t-elle pas l’audacieuse iniquité de nos ennemis ? peuvent-ils nous faire pis qu’ils nous font ? Voulez-vous une dernière fois recourir à d’humbles requêtes ? Soit, requérons, supplions encore ! mais si l’on nous répond par de nouveaux dénis de justice, alors, dressons-nous résolument, promptement, contre nos ennemis ! Nous sommes en majorité dans certaines villes commerçantes, dans certaines provinces, repoussons la force par la force, l’exemple sera bientôt suivi ; nos ennemis reculeront devant notre attitude menaçante et feront droit à nos légitimes exigences. Mais, selon moi, pousser trop loin notre longanimité serait nous exposer à voir décimer chaque jour notre parti ; et l’heure du combat venue… elle viendra, je le crois, fatalement… nous aurons perdu nos meilleurs soldats. En résumé, tentons une dernière fois d’obtenir le libre et paisible exercice de notre culte… sinon, aux armes !

le prince karl de gerolstein. — Mes frères, je suis étranger, j’arrive d’Allemagne ; j’ai assisté aux luttes et au triomphe de la réforme prêchée par le grand Luther ; permettez-moi de vous dire en deux mots ce que j’ai vu. L’on n’a pas, dans notre vieille Allemagne, requêté, supplié ; l’on a affirmé le droit de tout homme à prier selon sa conscience ; artisans, seigneurs, bourgeois, ont dit : — « Nous ne voulons plus subir le joug odieux de l’Église de Rome ; et à qui voudrait nous l’imposer par l’épée, nous résisterons par l’épée. » — À cette heure, la réforme, en Allemagne, défie ses ennemis. L’Allemagne n’est pas la France, je le sais ; mais les hommes sont partout les hommes ; partout la résolution s’appelle la résolution, et ses conséquences sont partout les mêmes !

jean calvin. — Monsieur Christian Lebrenn, quelle est votre opinion ?

christian lebrenn. — La voici. L’histoire m’enseigne que demander aux papes ou aux rois la réforme des superstitions ou de la tyrannie est absolument inutile. Jamais l’Église de Rome ne renoncera