Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 11.djvu/170

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— L’on peut se fier complètement à vous, Joséphin, je le sais, — répondit M. de Plouernel ; — vos informations me confirment dans le plan d’attaque que j’avais projeté. — Puis, s’adressant aux officiers, à qui venait de se joindre le pasteur Féron : — Voici, messieurs, en deux mots, mon plan : nous perdrions inutilement beaucoup de monde en assaillant de front la chaussée de l’étang et l’enceinte palissadée ; l’ennemi est sur pied, la rivière qu’il nous faut traverser serait battue de droite et de gauche par des feux croisés d’artillerie. Donc, afin de rendre l’attaque plus sûre et moins meurtrière, nous nous diviserons en trois corps ; le premier (j’en prendrai le commandement) tentera le passage de la rivière, si périlleux qu’il soit, afin d’attirer l’ennemi sur ce point, tandis que notre second corps de troupes, masqué par la châtaigneraie, remontera jusqu’à la jetée du marais, afin de prendre à revers les retranchements de la chaussée ; enfin, notre troisième corps se portera vers cet autre ouvrage avancé que vous voyez au delà de la courbe de la rivière. L’attaque ainsi engagée sur trois points à la fois, le gros de l’armée, qui nous suit à peu de distance, viendra nous soutenir. Le combat sera chaud, messieurs ; épargnons autant que possible le sang de nos soldats. Courage et prudence !

— De la prudence ! de l’hésitation ! lorsque le Seigneur combat à notre droite ! — s’écria le pasteur Féron, dans son bouillant enthousiasme ; — enfler l’orgueil de ces Philistins en n’osant les aborder de front !

— Diviser nos forces, au lieu d’accabler l’ennemi en les réunissant sur un seul point ! — ajouta l’un des principaux officiers ; — Monsieur de Plouernel, y songez-vous ?

— Messieurs, — s’écria le colonel, désolé de ces nouvelles objections, — je vous en adjure, croyez à ma vieille expérience… attaquer de front et en masse cette position est une entreprise aussi folle qu’intrépide !

— L’intrépidité est la force des enfants d’Israël ! — s’écria le pas-