Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 12.djvu/213

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accompagnée de son père et de son aïeule. Le premier regard de la jeune fille est pour Nominoë, et lui, la voyant si charmante et surtout si rayonnante de bonheur, ne regrette plus d’avoir triomphé de ses irrésolutions au sujet de ce mariage et se dit : — Mon père avait raison… mon refus l’aurait tuée ! — Aux côtés de Nominoë se tiennent Salaün et son frère, Gildas Lebrenn, vassal du comte de Plouernel, en la métairie de Karnak, dépendante du manoir de Mezléan ; les parents plus éloignés, les amis se pressent le long des murailles de la forge, laissant en son milieu un espace vide où viennent se placer les deux fiancés, conduits par le Baz-valan et le Brotaër. La physionomie de ces derniers n’est plus ironique et joviale, mais grave, recueillie ; l’expression touchante de traits de Paskou-le-Long fait en ce moment oublier sa laideur ridicule. Tankerù et Salaün remettent chacun un anneau d’argent au Baz-valan. Il les passe au doigt de Tina et de Nominoë. Après quoi le Brotaër leur dit : — Enfants, à genoux ! — (Les fiancés s’agenouillent sur le sol.) Le Brotaër reprend : — Échangez les anneaux que le Baz-valan vous a donnés en signe d’alliance indissoluble. — (Les fiancés échangent leurs anneaux.) Le Brotaër ajoute d’une voix grave : — Nominoë Lebrenn, Tina Tankerù, jurez-vous d’être unis l’un à l’autre sur la terre comme le doigt l’est à l’anneau ?

— Oh ! je le jure ! — répond Tina avec une expression de félicité céleste, en approchant de ses lèvres l’anneau que son fiancé a porté momentanément à son doigt.

— Je le jure ! — répond aussi Nominoë. Cependant, au moment de lier sa vie à celle de sa cousine, il ne peut vaincre une dernière irrésolution, et avant de prononcer le serment irrévocable, il a garde un silence d’une durée imperceptible à tout autre qu’à Salaün Lebrenn. Celui-ci comprend qu’à cette heure solennelle son fils vient d’éprouver une hésitation suprême.

— Tina Tankerù, Nominoë Lebrenn, — reprend le Brotaër, — soyez à jamais unis l’un à l’autre, comme le doigt l’est à l’anneau !