Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 13.djvu/142

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leur chute… je parle de la monarchie et de la noblesse… l’Église étant de soi-même… impérissable !…

— Dieu le veuille, l’abbé… Mais rassurez-vous, je ne resterai ni passif ni oisif… je compte servir notre cause plus activement, plus utilement à cette heure que lorsque j’étais à la tête de mon régiment des gardes.

— Cette assurance me comble de joie, cher comte… Quels sont donc vos projets ?

— D’abord je donne ce soir à souper.

— Est-ce une plaisanterie ?

— Rien de plus sérieux au contraire… seulement, il est entendu que le mot sérieux ne s’applique nullement au souper, qui sera, je l’espère… le plus joyeux du monde…

— Un souper joyeux… en ces temps menaçants !

— Pourquoi non ? Rien est-il plus joyeux que la confiance dans le succès… Aussi, viderons-nous ce soir plus d’un verre à la prochaine et certaine extermination de nos ennemis.

— Mais encore une fois, ce souper…

— … A pour but de réunir ici les chefs les plus influents du parti de la cour… afin de concerter nos dernières mesures… sous la présidence de la femme la plus extraordinaire et la plus adorable que j’aie rencontrée dans ma vie.

Le jésuite regarde M. de Plouernel avec un profond ébahissement, et reprend :

— Est-ce que je veille ?… est-ce que je rêve ?… une réunion politique d’une pareille importance… présidée… par qui… par une femme ?

— Votre étonnement cessera, cher abbé, lorsque vous connaîtrez madame la marquise Aldini.

— Une étrangère ?

— Oui, Vénitienne de naissance, elle est veuve du marquis Aldini, grand seigneur florentin. Il a laissé à sa femme une fortune