Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 13.djvu/17

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

seront, à leur mort, traînés sur la claie et privés de sépulture. — Défense aux pasteurs qui, selon l’arrêt, quitteront la France, de vendre leurs biens et d’emmener leurs enfants au-dessous de sept ans. »

Ainsi, fils de Joël, la loi !… la loi ordonnait la destruction du foyer domestique, brisait les liens sacrés de la famille, arche sainte jusqu’alors presque toujours respectée par les plus abominables tyrans. Enfin, Louvois écrivait en adressant aux généraux l’édit de révocation :

« — Sa Majesté veut que l’on fasse sentir les dernières rigueurs à ceux qui ne voudront pas se faire de sa religion, et ceux qui auront la sotte gloire de vouloir rester les derniers doivent être poussés jusqu’à la dernière extrémité. — Qu’on laisse d’ailleurs vivre les soldats très-licencieusement chez les huguenots. »

Cette impunité accordée par le représentant de l’autorité souveraine à une soldatesque impitoyable que vous avez vue à l’œuvre, fils de Joël, en France et en pays conquis, amena un débordement d’excès inouïs ; la rapine, le viol, la torture, le meurtre, furent les moyens ordinaires employés par ces convertisseurs bottés pour ramener les hérétiques au giron de leur douce et sainte mère, l’Église catholique, apostolique et romaine.

« — Beaucoup de malheureux moururent ou demeurèrent estropiés des suites des traitements qu’ils avaient subis de la part des soldats, — raconte un historien, témoin oculaire de ces horreurs. — Les tortures obscènes infligées aux femmes ne différaient guère du dernier outrage que par une perversité plus raffinée ; les inventions diaboliques des routiers et des seigneurs du moyen âge pour extorquer des rançons à leurs captifs furent renouvelées pour arracher des conversions ; on chauffa les pieds, on donna l’estrapade, on suspendit les patients par les extrémités, on attacha des mères au bois de leur lit, tandis que leurs enfants, encore à la mamelle, mouraient de faim à leurs yeux. De la torture à l’abjuration il