Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 13.djvu/183

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Victoria entendant les paroles de M. de Plouernel au sujet du sergent Maurice qu’elle a aimé éperdument et de qui le souvenir saigne incessamment dans son cœur ; Victoria, malgré son puissant empire sur elle-même, ne peut se dominer complètement, ses traits contractés prennent pendant un moment une expression terrible, son regard fixe et ardent s’attache sur M. de Plouernel et révèle une haine implacable.

l’abbé morlet, à part soi. — Quel est ce mystère ? La marquise, au nom de ce sergent des gardes-françaises, vient de jeter sur le comte un regard effrayant… regard que moi seul ici j’ai surpris peut-être… puis elle a rougi, elle toujours d’une pâleur de marbre ! Ah ! malgré moi, je sens renaître mes soupçons un moment dissipés par l’apparente horreur de cette femme pour les révolutionnaires… si elle nous abuse, combien j’aurais à regretter de m’être ouvert devant elle !… Et cependant quels rapports peuvent avoir existé entre cette marquise italienne et ce sergent aux gardes, mort il y a deux ans déjà ?

L’intendant entre de nouveau dans la salle à manger. Il a l’air effaré, consterné.

le comte de plouernel. — Eh bien ! Robert, quelles nouvelles ?

l’intendant. — Terribles ! monseigneur… terribles !

le comte de plouernel. — Mons Robert n’est pas optimiste… Voyons ces terribles nouvelles ?

l’intendant. — Les barrières du Trône et de Saint-Marcel sont en feu… on sonne partout le tocsin ! Les districts se sont tumultueusement rassemblés dans plusieurs églises !

le cardinal, vivement. — Vous entendez, messieurs ! Voyez, voyez l’empire de notre sainte religion !

l’intendant. — Hélas ! monseigneur, ce n’est point pour prier que les coquins ont envahi les églises.

le cardinal. — Et pourquoi donc ?

l’intendant. — Pour y entendre des scélérats de comédiens…