Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 13.djvu/263

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forcé par les événements, à donner, dis-je, un grand et profitable exemple aux autres princes de la confédération germanique… « Déposez, — lui disais-je, — un pouvoir entaché d’une criminelle origine, poussez le peuple de vos États et des autres principautés germaniques à se fédérer républicainement comme les cantons suisses et les Provinces-Unies des Pays Bas ! Les Polonais, les Hongrois, les Moldaves, les Valaques asservis par la Russie et par l’Autriche, mais de fait républicains par leur ancienne coutume élective, seront bientôt entraînés par l’exemple et par le cri de liberté !… — L’Italie, encore palpitante au glorieux souvenir de ses républiques de Gênes, de Venise, de Florence, de Rome, se soulèvera en masse pour entrer dans cette vaste confédération, avant-garde de la France, aussi revenue à l’antique gouvernement des Gaules ! L’Espagne elle-même, encore si jalouse de ses puissantes franchises provinciales qui s’imposaient à la monarchie par cette formule d’une fierté toute républicaine : Sinon, non, l’Espagne se joindra au mouvement ; alors les trois dernières puissances despotiques d’Europe, la Prusse, l’Autriche, la Russie, se trouveront cernées, menacés par cette redoutable coalition des peuples libres, et ils auront bientôt raison de ces derniers repaires de la royauté ! »

— Cette pensée était grande, généreuse, féconde, — s’écrie le vieillard avec un enthousiasme partagé par ses deux enfants, — c’était la réalisation de l’avenir !… Les États-Unis de l’Europe ! la République universelle !

— En cet avenir, j’ai foi comme vous, — reprend Frantz de Gerolstein, — mais mon père préfère laisser l’avenir se réaliser de soi-même, et jusque-là trôner le plus agréablement, le plus longtemps possible. Dès lors, convaincu de l’inutilité de mes instances, et croyant fermement que le devoir du citoyen prime le devoir du fils, je passai de la parole à l’action… je propageai de tout mon pouvoir et par tous les moyens, en Germanie son berceau, la secte des