Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 14.djvu/58

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tion des cordeliers, et il lit au milieu d’un profond silence l’adresse suivante :


le club des cordeliers à l’assemblée nationale.


« Nous étions esclaves en 1789, nous nous sommes crus libres en 1790 ; nous le sommes à la fin de juin 1791 ! puisque, par sa fuite, Louis XVI nous délivre de la royauté ! »

— Bravo ! — s’écrie-t-on dans les tribunes. — Voilà la question ! « — Vivre libres et sans maître ! » — comme l’écrivait le matin Bonneville dans la Bouche de fer ! — « Plus de rois ! pas de régents ! pas d’empereurs ! pas de protecteurs ! pas de dictateurs ! »

— Silence aux tribunes, — répondent grand nombre de jacobins. — Notre société porte le nom des jacobins amis de la Constitution ! La constitution reconnaît la royauté ! — Nous avons juré obéissance à la loi !

L’orateur des cordeliers attend que l’agitation soit apaisée ; puis il poursuit ainsi la lecture de l’adresse à l’Assemblée :

« — Législateurs ! vous aviez investi Louis XVI d’un pouvoir démesuré… vous aviez de nouveau consacré la tyrannie en instituant un roi inamovible, inviolable… héréditaire ! »

— Non, non ! — exclament violemment les jacobins. — Le roi ne peut plus être un tyran ; — il n’est que le représentant héréditaire de la nation ; — il est soumis à l’Assemblée nationale !

— Mais, citoyens, puisque l’individu royal s’est sauvé en injuriant, en reniant la constitution ! — réplique un auditeur des tribunes, — la royauté est donc déchue de fait, sacrebleu !

— C’est vrai !… — répétèrent les tribunes en applaudissant. — Il ne nous faut plus de rois ! — il y en a assez ! — il y en a trop ! puisqu’on en parle encore ! !

— Citoyen orateur, — s’écrie un membre des jacobins s’adressant au cordelier, — vous outragez la constitution… et nous avons juré de la défendre jusqu’à la mort !