Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 14.djvu/69

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faitement résumé les conséquences des événements qui, depuis cinq jours, agitent si profondément les esprits :

« — Que faire dans les circonstances actuelles ? — dit Brissot. — L’on propose six partis : — Abolir la royauté, y substituer le gouvernement républicain. — Faire juger le roi et la question de royauté par la nation. — Faire juger le roi par une cour nationale. — Exiger son abdication. — Interdire Louis Capet et nommer un régent. — Enfin, laisser le roi sur le trône, en lui donnant un conseil électif. — La première opinion présentée au public est tranchante : plus de rois, soyons républicains. — Tel a été le cri du Palais-Royal, de quelques sociétés populaires, de quelques écrivains ; mais cette opinion n’a pas fait autant de prosélytes qu’on le devait espérer ; les jacobins ont reçu avec indignation une députation du club des cordeliers, qui venait leur proposer la république : il semblait que ce fût un blasphème à leurs yeux. Cette répugnance pour le nom d’un état de choses où l’on est, paraît bien singulière aux yeux d’un philosophe… Cette singularité n’est que le fruit d’un secret calcul. »

J’ai en vain cherché à comprendre le sens de ces dernières paroles de Brissot : quel peut être le secret calcul des jacobins, dont il est impossible de suspecter le patriotisme et la bonne foi, même dans les erreurs de leur politique ?… Erreurs qui, selon moi, et je le répète, proviennent de ce que l’esprit bourgeois domine l’immense majorité des jacobins et qu’ils voient encore dans le gouvernement républicain un danger pour leurs intérêts. Cependant la tendance vers la république s’est considérablement accrue, ainsi que l’indignation publique contre Louis XVI et contre la majorité constitutionnelle de l’Assemblée. Plusieurs causes ont produit ces résultats, et d’abord cet audacieux manifeste du marquis de Bouillé, effrontément adressé par lui avant-hier aux représentants du peuple, et ainsi terminé :

« — … Je connais mes forces ; bientôt votre châtiment servira