Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 15.djvu/159

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conduite impitoyable de mon père envers toi ne t’autorise pas à t’éloigner de lui ?…

— Et pourtant, s’il s’opposait à cette séparation ? Mon Dieu ! mon Dieu ! il en a peut être le droit, mes enfants ?

— Rassurez-vous, chère belle-mère, — reprend Jean Lebrenn ; — d’abord, cette séparation allégera M. Desmarais d’une grande appréhension, celle d’être compromis par ses rapports de parenté avec M. Hubert, votre frère, qui, malheureusement…

—… A refusé d’accepter la proposition si loyale, si honorable que je lui ai faite en votre nom, mon cher Jean, — dit madame Desmarais avec abattement et les yeux humides de larmes. — Mon frère m’a répondu qu’il appréciait dignement vos sentiments à son égard en cette circonstance, mais qu’il regarderait comme une lâcheté de prendre l’engagement de rester passif, et qu’il voulait conserver sa liberté d’action pour combattre la république par tous les moyens possibles.

— Hélas ! — reprit Charlotte en soupirant, — je déplore l’aveuglement de mon oncle, et je ne peux m’empêcher de rendre hommage à la fermeté de son caractère.

— M. Hubert est, il est vrai, ma chère Charlotte, l’un de ces adversaires que l’on estime en luttant contre eux ; j’espère, ainsi que je l’ai plusieurs fois répété à votre mère, que, surtout frappé de l’attitude de la population de Paris dans la journée du 21 janvier, votre oncle, homme de bon sens, reconnaîtra combien serait vaine maintenant toute tentative contre la république, — ajouta Jean Lebrenn ; — en tous cas, chère belle-mère, M. Desmarais, si terrifié naguère des périls auxquels il se croyait exposé par la parenté de M. Hubert, votre frère, ne verra sans doute, dans votre détermination de vous séparer de lui, qu’un gage donné à sa sécurité à venir, et il ne songera guère à vous retenir.

— L’observation de Jean est très-juste, chère maman.

— Soit, mon enfant ; mais, dans sa fureur d’être abandonné par