Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 15.djvu/248

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nous voir travailler tandis qu’il reste oisif malgré lui. Avant-hier il a voulu essayer d’ajuster une platine… un ouvrage de demoiselle pourtant… mais bah ! presque aussitôt une faiblesse l’a pris, et nous n’avons eu que le temps de le transporter dans le jardin.

— Nous reparlerons de ce brave enfant. J’aurai peut-être à te demander de lui rendre un service.

— Tu n’as qu’à parler ; tout le monde aime Olivier… et je fais comme tout le monde.

— Merci, Castillon ; je savais pouvoir au besoin compter sur toi, — dit Jean Lebrenn. Et agitant la sonnette, il ajouta : — J’ai deux mots à dire à Gertrude avant d’aller vous rejoindre… va, vous ne m’attendrez pas longtemps.

Castillon sort, et Gertrude étant entrée à l’appel de la sonnette Jean Lebrenn dit à la servante :

— Ma sœur est-elle dans sa chambre ?

— Non, monsieur, elle est sortie il y a plus de deux heures… disant qu’elle ne reviendrait peut-être pas souper… Pauvre demoiselle ! Vous devriez bien, monsieur Jean, consulter pour elle le médecin qui a soigné le petit Olivier.

— Savez-vous où il est à cette heure ?

— Il est remonté à la fin du jour dans sa chambre ; il se trouvait, disait-il, très-fatigué… il se plaignait de la fièvre et du frisson. Il m’a priée de lui donner un peu de braise dans un réchaud afin de tenir sa tisane chaude… je lui ai conseillé de la boire bouillante et de tâcher de transpirer.

— Allez, je vous prie, Gertrude, voir comment il se trouve et s’il n’a besoin de rien, — répond Jean Lebrenn, et se parlant à lui-même, il ajoute : — Ah ! que de malheurs j’entrevois, si, comme Charlotte le suppose et comme j’ai tout lieu de le craindre, Victoria aime Olivier… et s’il ressent pour elle une folle passion… Fatal amour ! il est sans issue ! Le passé de ma sœur, ses fiançailles avec le frère de ce pauvre enfant la condamnent à ne jamais se marier