je devrais dire du même crime… car, oubliant la chose publique ou la confondant avec leur personnalité, ils ont perdu un temps irréparable à s’accuser réciproquement de trahison au lieu de ne songer qu’à la défense de la république ! Ainsi le procès de Capet a traîné durant quatre mois. La nouvelle constitution est à peine ébauchée. L’éducation nationale est à l’état de projet ; enfin, si l’on excepte l’emprunt forcé d’un milliard sur les riches et le décret du maximum, nous attendons encore les lois qui doivent affranchir matériellement le prolétaire, de même qu’il est civilement et politiquement affranchi.
— Nous sommes de ton avis, l’ami Jean ; la bourgeoisie a eu sa bonne, sa grosse part de la révolution… c’est justice… mais Jacques Bonhomme n’a encore que la moitié de sa part à lui. Il a conquis ses droits politiques, le suffrage universel et la république… c’est bien… c’est quelque chose… mais ce n’est pas tout.
— Si, mes amis, c’est tout ; car vous ne pouvez prétendre davantage…
— Que diable nous dis-tu là, hé ! l’ami Jean ?… Est-ce que la république et le suffrage universel vous mettent du pain sous la dent, par hasard ?
— Certes, frères ! posséder la république, basée sur le suffrage universel, c’est posséder le moyen assuré d’avoir pour les nôtres l’éducation, l’instruction, le bien-être, la sécurité du présent et de l’avenir pour nous, pour nos familles, grâce à une équitable rémunération de notre travail et à notre affranchissement de l’exploitation du capital.
— Ah çà, l’ami Jean, entendons-nous… Tu viens justement tout à l’heure de nous dire que nous autres prolétaires nous attendions encore notre complète délivrance, et cependant nous la possédons, cette république basée sur le suffrage universel…
— Et à qui la faute, mes amis, si nos légitimes espérances ne sont pas encore réalisées ?