Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 16.djvu/122

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


— Oui ! oui ! — s’écrient une foule de voix. — Bravo, Tallien ! — Un tonnerre d’applaudissements retentit dans la salle ; les deux Robespierre et Lebas se lèvent et s’écrient, au milieu d’un tumulte croissant, qu’il est indigne de couper la parole à Saint-Just.

DESMARAIS, montrant le poing à l’orateur. — « On te coupera mieux que la parole, scélérat !!! »

SAINT-JUST, à la tribune et d’une voix forte qui domine le tumulte. « — Citoyens, vous m’entendrez, je… »

BILLAUD-VARENNE, de sa place, avec véhémence. — « Je demande la parole pour une motion d’ordre. Hier soir, le club des Jacobins était rempli d’hommes apostés, puisqu’aucun n’avait de carte ; hier, on a développé dans cette société l’intention d’égorger la Convention nationale. » (Mouvement d’horreur prolongé. Tallien, Fréron, s’agitent sur leurs bancs et menacent du geste Robespierre. BILLAUD-VARENNE continue.) « Le moment de dire la vérité est arrivé… Je m’étonne de voir Saint-Just à la tribune, après ce qui s’est passé. Il avait promis aux deux comités de leur soumettre son discours avant de le lire à la Convention, et même de le supprimer s’il leur semblait dangereux. L’Assemblée jugerait mal les événements et la position dans laquelle elle se trouve, si elle dissimulait qu’elle est entre deux égorgements. Elle périra si elle est faible ! »

À ces mots, un tumulte effroyable s’élève dans la salle. Les chefs des conjurés se lèvent et, agitant leurs chapeaux, s’écrient : — « Non ! non ! l’Assemblée ne périra pas ! — Le plus grand nombre des représentants entraînés par l’exemple des meneurs, se lèvent à leur tour en s’écriant : « — Non ! l’Assemblée ne se laissera pas égorger ! » — Des affidés apostés dans les tribunes applaudissent à tout rompre, et s’écrient : — « Vive la Convention ! Vive le comité de salut public ! »

SAINT-JUST, à la tribune. — « Citoyens, on vous trompe, écoutez-moi… »

FOUCHÉ. — « À bas ! à bas ! La parole est à Billaud-Varenne ! »

VOIX NOMBREUSES. — « Oui ! oui ! parlez, Billaud, parlez ! »

Saint-Just, pâle et calme, jette un ferme regard sur l’Assemblée, et répond par un geste à Robespierre, qui lui fait signe de ne pas quitter la tribune.

BILLAUD-VARENNE. — « Je demande que tous les hommes s’expliquent dans cette Assemblée. On est bien fort quand a pour soi la justice, la probité, les droits du peuple. Vous frémirez d’horreur quand