Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 16.djvu/65

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les plus à craindre, mais les ambitieux : voilà ceux qu’il faut frapper, cordeliers ! Eh bien ! quels sont les moyens de nous délivrer de cette faction de scélérats ? L’insurrection, oui, l’insurrection ! Et nous, cordeliers, nous ne serons pas les derniers à donner le signal qui doit frapper à mort les oppresseurs ! »

Après d’autres discours non moins enragés, le club des Cordeliers décida « que le tableau de la Déclaration des droits de l’homme serait et resterait voilé d’un crêpe funèbre jusqu’à ce que le peuple eût recouvré ses droits sacrés, en anéantissant la faction modérée, à savoir les jacobins. »

Le peuple, habitué dès le 31 mai, à respecter la Convention, incarnation de la souveraineté nationale, ne répondit pas à l’appel insurrectionnel des hébertistes ; une seule section, celle de Marat, députa des délégués à la commune, pour lui signifier « que les sectionnaires resteraient debout et en armes jusqu’à ce que la Convention, cédant à la pression d’un nouveau 31 mai, se fût purgée des modérés. » Ces projets d’insurrection, réprouvés par la commune, ainsi qu’ils l’avaient été par la généralité des citoyens, conduisirent plusieurs hébertistes à leur perte ; un décret de la Convention enjoignit à l’accusateur public de rechercher les fauteurs de l’insurrection avortée. Collot-d’Herbois et Carrier, montant à la tribune afin de se disculper, eux et leurs complices, affirmèrent que les journaux avaient dénaturé les paroles prononcées au club des Cordeliers ; l’on n’avait parlé de l’insurrection que conditionnellement, etc., etc. Hébert, le 19 ventose, nia plus effrontément encore la flagrante vérité, accusant de scélératesse les écrivains qui donnaient à penser que lui et ses amis voulaient attenter à la représentation nationale ; le jour même, une députation du club des Cordeliers vint aux Jacobins, où dominait l’influence de Robespierre, et leur donnèrent l’accolade fraternelle. « Un embrassement de plus, — dit Camille Desmoulins avec sa verve ironique, — et les jacobins étaient poignardés par leurs bons frères ! » Néanmoins, cédant aux instances de Robespierre, le comité de salut public (23 ventose) signa l’ordre d’arrestation de ceux des hébertistes que leur position à la Convention et leurs intelligences dans les comités ne rendaient malheureusement pas, pour ainsi dire, inattaquables, tels que Carrier, Tallien, Fouché, Bourdon (de l’Oise), etc., etc. ; et à la suite d’un rapport de Saint-Just, les ultra-révolutionnaires Hébert, Ronsin, Vincent, Momoro, Ducroquet et Lannier furent traduits devant let tribunal révolutionnaire ; le club des Cordeliers se résigna de nouveau à voiler