Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 3.djvu/109

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une statue colossale à trois têtes, presque informe, taillée grossièrement à coups de hache dans un tronc d’arbre énorme et d’un aspect repoussant.

Riowag fit signe aux quatre guerriers noirs qui me portaient sur leurs épaules de s’arrêter au pied de la statue, et il entra seul dans la grotte, pendant que les hommes de mon escorte criaient :

– Elwig ! Elwig !

– Elwig ! prêtresse des dieux infernaux !

– Réjouis-toi, Elwig, nous t’apportons de quoi remplir ta chaudière !

– Tu nous diras tes augures !

– Et tu nous apprendras si la terre des Gaules ne sera pas bientôt la nôtre !

Après une assez longue attente, la prêtresse, suivie de Riowag, apparut au dehors de la caverne.

Je m’attendais à voir quelque hideuse vieille, je me trompais : Elwig était jeune, grande et d’une sorte de beauté sauvage ; ses yeux gris, surmontés d’épais sourcils naturellement roux, de même nuance que ses cheveux, étincelaient comme l’acier du long couteau dont elle était armée ; son nez en bec d’aigle, son front élevé, lui donnaient une physionomie imposante et farouche. Elle était vêtue d’une longue tunique de couleur sombre ; son cou et ses bras nus étaient surchargés de grossiers colliers et de bracelets de cuivre, qui, dans sa marche, bruissaient, choqués les uns contre les autres, et sur lesquels, en s’approchant de moi, elle jeta plusieurs fois un regard de coquetterie sauvage. Sur son épaisse et longue chevelure rousse, éparse autour de ses épaules, elle portait une espèce de chaperon écarlate, ridiculement imité de la charmante coiffure que les femmes gauloises avaient adoptée. Enfin, je crus remarquer (je ne me trompais pas) chez cette étrange créature ce mélange de hauteur et de vanité puérile particulier aux peuples barbares.

Riowag, debout à quelques pas d’elle, semblait la contempler avec