Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 3.djvu/134

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Au bout de quelques instants nous étions sortis de la grotte… Les étoiles brillaient si vivement au ciel, qu’une fois hors du bois où nous nous trouvions encore, l’on devait voir à quelques pas devant soi.

La prêtresse s’arrêta un moment et appela :

– Riowag !…

– Riowag est là… — répondit une voix si proche, que le roi des guerriers noirs, qui venait de répondre à l’appel de la prêtresse, était sans doute tout près de moi, à me toucher… pourtant ce fut en vain que j’essayai de distinguer sa forme noire au milieu de la nuit. Je compris plus que jamais combien ces guerriers, se confondant avec l’ombre, devaient être redoutables pour les embuscades nocturnes.

– Y a-t-il loin d’ici les bords du Rhin ? — demandai-je à Riowag. — Tu dois connaître l’endroit où j’ai débarqué, puisque tu étais le chef de ceux qui nous ont envoyé une grêle de flèches.

– Nous n’avons pas longtemps à marcher pour regagner l’endroit où tu as pris terre, — me répondit Riowag.

– Nous faudra-t-il traverser le camp ? — lui dis-je, en voyant à peu de distance la lueur des feux allumés par les Franks.

Mes deux conducteurs ne me répondirent pas, échangèrent à voix basse quelques paroles, me prirent chacun par un bras, et nous suivîmes un chemin qui s’éloignait du camp. Bientôt le bruit des grandes eaux du Rhin arriva jusqu’à moi. Nous approchions de plus en plus du rivage ; enfin j’aperçus, du haut de l’escarpement où je me trouvais, une sorte de nappe blanchâtre à travers l’obscurité de la nuit… c’était le fleuve !

– Nous allons remonter maintenant deux cents pas sur la grève, — me dit Riowag ; — nous atteindrons ainsi l’endroit où tu as débarqué sous nos flèches… Ton bateau doit t’attendre à peu de distance de là… Si tu nous as trompés, ton sang rougira la grève, et les eaux du Rhin entraîneront ton cadavre…