Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 3.djvu/279

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Unissons-nous dans un but commun pour assurer à jamais l’avenir de notre glorieuse patrie ; unissons, non pas nos corps, je suis vieux… vous êtes belle et jeune encore, Victoria… mais unissons nos âmes devant un prêtre de la religion nouvelle, dont le pape est à Rome… Embrassez le christianisme, devenez mon épouse devant Dieu… et proclamez-nous, vous, impératrice, moi, empereur des Gaules… L’armée n’aura qu’une voix pour vous élever au trône… vous régnerez seule et sans partage… Quant à moi, vous le savez, je n’ai aucune ambition, et, malgré mon vain titre d’empereur, je continuerai d’être votre premier sujet… Seulement, il sera, je crois, très-politique d’adopter mon fils comme successeur au trône ; il est en âge d’être marié ; nous choisirons pour lui une alliance souveraine… j’ai déjà mes vues… et la monarchie des Gaules est à jamais fondée… Voilà, Victoria, ce que je vous proposais hier… voilà ce que je vous propose aujourd’hui… Je vous ai, selon votre désir, exposé de nouveau mes projets pour le bien du pays ; adoptez ce plan, fruit de longues années de méditation, d’expérience… et la Gaule marche à la tête des nations du monde…

Un assez long silence de ma sœur de lait suivit ces paroles de son parent… Elle reprit, toujours calme :

— J’ai été sagement inspirée en voulant vous entendre une seconde fois, Tétrik… Et d’abord, dites-moi, vous avez abjuré pour la religion nouvelle l’antique foi de nos pères ? La Gaule, presque tout entière, est cependant restée fidèle à la foi druidique.

— Aussi ai-je tenu, par politique, mon abjuration secrète, d’accord en cela avec le pape de Rome ; mais si, acceptant mon offre, vous abjuriez aussi votre idolâtrie lors de notre mariage, je confesserais très-haut ma nouvelle croyance ; et, selon la profonde prévision des évêques, votre conversion, à vous, Victoria, l’idole de notre peuple, entraînerait la conversion des trois quarts du pays ; le reste suivra bientôt, car j’ai la promesse des évêques qu’ils vous glorifieront comme une sainte au milieu des pompes splendides de la nou-