Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 5.djvu/277

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ments des chiens, voyaient au loin, de temps à autre, le cerf, la meute et les veneurs sortir des enceintes et traverser les allées. Dès le début de la chasse, Karl, emporté par son ardeur, avait abandonné ses filles, incapables d’ailleurs de le suivre au plus épais des fourrés, où l’empereur des Franks pénétrait comme le dernier de ses veneurs. Vortigern, un moment séparé de son aïeul, au milieu de ce tumultueux rassemblement, où près de cent chevaux, réunis dans un carrefour, excités par les fanfares des trompes, et s’animant entre eux, piaffaient, hennissaient, se cabraient, Vortigern, dressé sur ses étriers, cherchait Amael du regard, lorsque, faisant un violent écart, son cheval s’emporta si rapidement, que lorsque le jeune Breton parvint, après de grands efforts, à maîtriser sa monture, il se trouva très-éloigné des chasseurs. Tâchant alors de percer des yeux le brouillard qui s’épaississait de plus en plus, il se vit seul dans une longue avenue dont il ne pouvait plus distinguer les issues voilées par la brume. Il prêta l’oreille, espérant entendre au loin le bruit de la chasse, qui l’aurait guidé pour la rejoindre ; mais le plus profond silence régnait dans cette partie de la forêt, dont Vortigern ignorait les chemins. Cependant, au bout de quelques instants, le galop rapide de deux chevaux, s’avançant derrière lui à toute vitesse, frappa son oreille ; puis, un cri, paraissant poussé plutôt par la colère que par l’effroi, parvint à son oreille, et bientôt il aperçut à travers le brouillard une forme vague ; elle devint de plus en plus distincte, et la blonde Thétralde, fille de l’empereur des Franks, apparut aux yeux du jeune Breton : vêtue d’une longue robe de drap bleu-saphir, bordée d’hermine, blanche comme le pelage de sa haquenée, Thétralde portait, sur ses tresses blondes, un petit bonnet aussi d’hermine ; une écharpe de soie tyrienne, aux vives couleurs, dont les longs bouts flottaient au vent, ceignait sa fine taille. La naïve et charmante figure de la fille de l’empereur, animée par l’ardeur de sa course, brillait d’un vif incarnat ; rougissant de plus en plus à l’aspect de Vortigern, elle baissa ses grands yeux bleus, tan-