Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 5.djvu/342

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— Une dernière fois je te dis ceci, moine : Ton roi veut la guerre, il aura la guerre. — Et Vortigern, retombé dans ses réflexions, chemina silencieux à côté de Witchaire jusqu’à ce que les cavaliers eussent atteint la cité de Guenhek. Là, Vortigern confia la conduite de l’abbé à un guide sûr, et tandis que le messager de Louis-le-Pieux se dirigeait vers les frontières de la Bretagne, le frère de Noblède regagna la demeure de Morvan.


le défilé de glen-clan.


Le défilé de Glen-Clan est le seul passage praticable à travers le dernier chaînon des montagnes Noires, ceinture de granit qui défend le cœur de la Bretagne. Il est si étroit, le défilé de Glen-Clan, qu’un chariot peut à peine y trouver passage ; elle est si rapide, la pente du défilé de Glen-Clan, que six paires de bœufs suffisent à peine à traîner un chariot sur sa rampe escarpée, du haut de laquelle une pierre roulerait d’elle-même avec vitesse jusqu’en bas de ce chemin creusé comme le lit d’un torrent, au fond d’immenses rochers à pic de cent pieds de hauteur. Un bruit lointain, d’abord confus, et de plus en plus rapproché, vient troubler le profond silence de cette solitude ; on distingue peu à peu le sourd piétinement de la cavalerie, le cliquetis des armes de fer sur des armures de fer, le pas cadencé de nombreuses troupes de piétons, le cri de la roue des chariots cahotant sur un sol pierreux, le hennissement des chevaux, le mugissement des attelages de bœufs ; tous ces bruits divers se rapprochent, grandissent, se confondent, ils annoncent l’approche d’un corps d’armée considérable. Soudain le cri lugubre et prolongé d’un oiseau de nuit se fait entendre à la cime des roches qui surplombent les défilés ; d’autres cris, de plus en plus éloignés, répondent au premier signal comme un écho de plus en plus affaibli ; puis l’on n’entend plus rien… rien que le bruit tumultueux du corps d’armée qui s’avance. Une petite troupe paraît à l’entrée de ce tortueux passage, un moine à cheval la guide ; toujours les gens d’église, toujours ! lorsqu’il