Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 5.djvu/35

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autre d’aller à la guerre attraper de bons coups ! je préfère m’amuser et faire ce qui me plaît ; mais alors, pourquoi donc notre frère Sigebert s’en est-il allé à cheval, suivi de guerriers, en compagnie du duk Warnachaire ?

— Votre frère est maladif, mes enfants ; les médecins m’ont conseillé de lui faire entreprendre, pour le bien de sa santé, un long voyage…

— Et reviendra-t-il bientôt ?

— Peut-être demain… peut-être aujourd’hui.

— Oh ! tant mieux, grand’mère, tant mieux, sa place ne restera pas vide dans notre chambre, il nous manque…

— Ne vous réjouissez pas trop quant à cela, chers roitelets ; désormais Sigebert aura sa chambre à part… Oh ! c’est que c’est déjà un petit homme, lui !

— Il n’a pourtant qu’un an de plus que moi.

— Oh ! oh ! mais dans un an tu seras aussi un homme, toi, mon petit Childebert, — répondit Brunehaut en échangeant avec Chrotechilde un épouvantable regard, — alors, comme ton frère, tu auras ta chambre à part et… et tout ce qui s’en suit ; n’est-ce pas, Chrotechilde ?

— Certainement, madame… il ne faut point faire de jaloux.

— Qu’est-ce que j’aurai donc, grand’mère, de plus que ma chambre à part ?

— Eh ! mais, tes chambellans, tes écuyers, tes serviteurs, tes esclaves, tous gens soumis à tes caprices, comme les chiens à la houssine.

— Oh ! que je voudrais donc être plus vieux d’un an !

— Et moi aussi, je te voudrais voir plus vieux d’un an… et Corbe aussi, et toi aussi, petit Mérovée, je voudrais vous voir tous de l’âge de Sigebert.

— Patience, madame, — dit Chrotechilde en échangeant de nouveau un regard diabolique avec Brunehaut, — patience, cela viendra… Mais quel est ce bruit dans la grande salle… De nom-