Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 5.djvu/361

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fougue de leurs chevaux, et ne pouvant les maîtriser, afin de se reformer en ordre d’attaque, s’élancèrent à toute bride en masses confuses, dans l’espoir d’écraser la cavalerie ennemie sous l’irrésistible élan de cette descente impétueuse ; mais soudain se divisant en deux corps, commandés l’un par Morvan, l’autre par Vortigern, les cavaliers armoricains prirent la fuite à droite et à gauche, au lieu d’attendre les Franks. Le vaste espace qui s’étendait du pied de la colline à la rivière, se trouvant ainsi dégagé par la volte subite et rapide des Gaulois, les premiers rangs des Franks purent à grand’peine arrêter leurs chevaux à cent pas du bord de la Scoër. Alors Morvan et Vortigern, profitant du désordre des ennemis, successivement arrêtés par la largeur de la rivière, revinrent au combat, les prirent en flanc, à droite, à gauche, les chargèrent avec furie, et en firent un effroyable carnage, culbutant dans les eaux les Franks qui échappaient à leurs sabres ou à leurs haches. Pendant ce combat acharné, les débris de l’infanterie de Louis-le-Pieux, fuyant aussi la lande embrasée de Kennor, arrivèrent tour à tour en désordre ; mais, ces troupes, se reformant en cohortes sur le sommet des versants de la vallée, s’élancèrent sur les cavaliers bretons d’abord vainqueurs, et, changeant la face du combat, cette réserve les écrasa sous le nombre ; de l’autre côté de la rivière, leur dernière barrière, était rangée la rustique infanterie gauloise, laboureurs, bergers, bûcherons, armés de piques, de faux, de haches, les plus exercés portant l’arc et la fronde. Derrière eux, dans une enceinte défendue par des abattis de bois et des fossés, étaient rassemblés les femmes, les enfants des combattants ; ces familles éplorées fuyant devant l’invasion, avaient emporté leurs objets les plus précieux, et attendaient dans une angoisse terrible l’issue de cette dernière bataille…………

Pleure ! pleure ! Bretagne, et pourtant glorifie-toi ! Tes fils écrasés par le nombre ont résisté jusqu’à la fin ! tous sont tombés blessés ou morts en détendant leur liberté ! La rivière était en un endroit guéable pour l’infanterie ; le moine qui avait guidé Neroweg indi-