Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 5.djvu/59

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Et à qui la faute ? À l’armée qui a trahi notre grand’mère, — s’écria Corbe avec colère. — On le disait autour de nous… les troupes ont fui sans combattre. Le duc Warnachaire… le chien qu’il est, avait préparé cette trahison !

— Plus bas, Corbe… plus bas, — reprit Sigebert d’une voix étouffée, — tu vas éveiller Mérovée… cher petit ! je voudrais dormir comme lui, je ne penserais à rien.

— Tu pleures toujours, toi, Sigebert… que veux-tu qu’on nous fasse ?

— Ne sommes-nous pas entre les mains de l’ennemi de notre grand’mère ?

— Ne crains rien, elle va venir nous délivrer avec une autre armée, et elle tuera Clotaire… Tu n’as pas faim, toi ?

— Non… oh ! non !

— Le soleil est levé depuis longtemps ; on va sans doute nous apporter à manger. Ah ! elle disait vrai, notre grand’mère : c’est fatigant et ennuyeux la guerre, même quand on n’est pas prisonnier… Mais comme il dort, ce Mérovée ; éveille-le donc.

— Oh ! mon frère, laissons-le dormir ; il se croit peut-être, comme toi tout à l’heure, dans notre palais de Châlons.

— Tant pis ! nous sommes éveillés nous autres. Je ne veux plus qu’il dorme, lui…

— Corbe… ce que tu dis là n’est pas d’un bon cœur.

— Sigebert ! Sigebert ! la porte s’ouvre… on nous apporte à manger.

La porte s’ouvrit en effet ; quatre personnages entrèrent dans l’intérieur de la masure ; deux étaient vêtus de casaques de peaux de bête, et l’un tenait à la main un paquet de cordes. Clotaire II et Warnachaire accompagnaient ces deux hommes : le duk portait son armure de bataille, le roi une longue robe de soie de couleur claire, bordée de fourrure.