Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 6.djvu/190

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le savoir, tels que les Sismondi, les Henri Martin, les Michelet, les Thierry, c’est que M. Guizot ne peut être suspecté de démagogie, comme on dit en ces temps-ci, et puis ce juste hommage rendu à l’autorité de son jugement historique, sera en même temps une sanglante critique de sa conduite actuelle ; les journaux royalistes ne nous apprennent-ils pas que M. Guizot, recommençant son voyage de Gand (dans les salles à manger du faubourg Saint-Germain), s’efforce de fusionner, au profit du droit divin, dans l’espoir de ramener Henri V, le dernier descendant de Hugh le Chappet, fondateur de cette troisième dynastie de rois étrangers à la Gaule, notre mère patrie ? Henri V, héritier de la monarchie de Clovis ; Henri V, qui, selon M. Berryer, ne peut remettre les pieds en France que comme roi de ce peuple conquis par ses ancêtres ! Cette prétention de représenter par tradition la race conquérante a été de tous temps soutenue par les royalistes radicaux : je vous en ai donné des preuves qui ne remontent pas plus haut que les dernières années de la Restauration. Ce fier et audacieux langage n’était que l’écho d’autres paroles prononcées vers le milieu du siècle dernier, et parmi lesquelles je vous citerai celles-ci :

« — ... Il est faux que ce ne soit pas la force des armes et la conquête qui aient fondé primitivement la distinction que l’on énonce aujourd’hui par les termes de noble et de roturier. Il est faux que nous soyons nobles par un autre intérêt que notre intérêt propre ; nous sommes, sinon les descendants en ligne directe, du moins les représentants immédiats de la rare des conquérants des gaules, leur succession nous appartient, la terre des gaules est à nous. »

(Hist. de l’ancien Gouvernement de France, par M. le comte de Boulainvilliers, tome 1, p. 21-37.)

Permettez-moi, chers lecteurs, en terminant, de vous remercier encore de la continuité de votre bienveillant intérêt pour cette œuvre, rendue presque de circonstance par les inconcevables prétentions des partis rétrogrades. Qui eût dit, lorsque j’ai commencé à publier ce livre, qu’aujourd’hui, en l’an IV de notre immortelle République de Février, il y aurait opportunité, nécessité, patriotisme à combattre le trône et l’autel, afin de nous prémunir contre les éventualités de l’avenir en évoquant les honteux et terribles souvenirs du passé !

EUGÈNE SUE,...............................
Représentant du Peuple................……...

Paris, 25 juin 1851.