Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 6.djvu/275

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triste nuit dans ce cachot, au milieu de ces instruments de torture...

— Puisque tu parles de ces engins de supplice, — dit Garin-Mange-Vilain avec un sourire étrange et prenant la main du bourgeois, — viens, Bezenecq-le-Riche, je veux t’expliquer leur usage...

— Je suis, je vous l’avoue, digne baillif, peu curieux de ces choses-là...

— Viens toujours, Bezenecq-le-Riche.

— Ce surnom de Riche que vous persistez à me donner n’est plus le mien, — dit le marchand avec un triste sourire ; — appelez-moi plutôt Bezenecq-le-Pauvre.

— Oh ! oh ! — fit Garin d’un air de doute ; en hochant la tête ; et il ajouta : Viens, Bezenecq-le-Riche.

— Mon père ! s’écria Isoline avec inquiétude en voyant le bourgeois s’éloigner d’elle, — où vas-tu ?

— Ne crains rien, chère enfant ; reste là, je vais donner au baillif quelques renseignements sur la route que doit prendre le messager du seigneur comte. — Et craignant de mécontenter Garin, il le suivit, heureux de ce qu’Isoline ne pouvait entendre la lugubre explication qu’il allait recevoir de Mange-Vilain. Celui-ci s’arrêta d’abord devant la potence de fer terminée par un carcan ; l’un, des bourreaux ayant haussé sa lanterne à l’ordre de Garin, il dit au marchand : — Ce carcan, tu le vois, s’ouvre à volonté.

— Oui, de telle sorte que l’on y introduit sans doute le cou du patient ?

— C’est cela, on le fait monter à l’échelle que voici ; puis, une fois qu’il a le cou dans le carcan on ôte l’échelle, on referme le collier de fer au moyen d’une clavette ; or, la potence se trouvant élevée de neuf à dix pieds au-dessus de terre...

— Le patient demeure pendu et étranglé ?

— Non pas ! Il demeure suspendu... mais non pendu, le carcan est trop large pour l’étrangler ; aussi, lorsque notre homme est ainsi gigottant à égale distance de la voûte et du sol, on lui attache avec