trouvant d’ailleurs, disait-elle, une sorte d’audacieux plaisir à braver la haine de cet homme… Effrayé de cette dédaigneuse insouciance, j’ai voulu prévenir le prince… mais alors Madame de Montbar m’a supplié de tout cacher à son mari.
— Cela est étrange ! n’est-il pas vrai, Monsieur ?
— Si étrange… que dans l’intérêt même de la princesse je voulais passer outre… mais alors ses supplications sont devenues si pressantes, elle a invoqué des intérêts si sacrés…
Je regardai le docteur avec surprise, il ne s’expliqua pas davantage et continua :
— Ses instances ont été telles enfin, que je lui ai promis sur l’honneur de ne rien dire au prince.
— Monsieur… je puis bien peu dans ma condition… mais madame de Montbar n’aura pas un serviteur plus dévoué, plus vigilant que moi… je n’ai que ma vie… mais ma vie lui appartient.
— Aussi je me sens plus rassuré… Mais, dis-moi, — reprit mon maître, — la princesse te connaît-elle déjà ? Il faut que je sache cela pour la forme de ma recommandation.
— Je suis complétement étranger, inconnu à la princesse, Monsieur.
— Et tu te dévoues si vaillamment ?… Va, ne crains rien, je ne chercherai pas à pénétrer ton secret.
Et le docteur continua, après un moment de réflexion :
— C’est cela… j’écrirai à la princesse… je chargerai mon fils de lui remettre ma lettre, Régina, j’en suis certain, remplira cette dernière volonté d’un vieil ami, et te prendra à son service.
— Votre fils ! Monsieur !
— Oui… je laisserai ainsi à madame de Montbar deux protecteurs dévoués qui exerceront leur sollicitude pour elle dans deux sphères différentes…
— M. votre fils connaît déjà la princesse, Monsieur ?
— Souvent je lui ai parlé d’elle, il a appris de moi à l’aimer, à la respecter… Elle, de son côté, m’a bien des fois entendu parler de mon fils avec toute l’affection qu’il mérite ; aussi la princesse m’a prié plusieurs fois depuis son mariage… de lui présenter Just… —