Page:Sue - Les misères des enfants trouvés II (1850).djvu/131

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— Regarde dans ce rouleau, — me dit Bamboche.

Je dépliai le papier et je m’écriai :

— De l’or !

— De l’or ! — s’écria Basquine à son tour, — tout ça de l’or !

— À un autre rouleau ! — me dit Bamboche avec une satisfaction de plus en plus triomphante.

Je donnai à Basquine le rouleau que je tenais, j’en pris un second.

— Encore de l’or, — lui dis-je.

— Toujours de l’or, — dit Bamboche radieux, — toujours de l’or. Ça serait ainsi jusqu’à demain… Ces rouleaux en sont pleins. Je n’ai pas eu le temps de les compter, mais il y en a peut-être là pour quinze ou vingt mille francs.

— Quinze ou vingt mille francs ! — répétai-je avec stupeur.

Tout à coup Basquine se mit à rire si bruyamment, en regardant le rouleau que Bamboche et moi nous nous écriâmes :

— Qu’as-tu donc à rire ?

— Ah ! la bonne farce… — reprit Basquine en redoublant d’hilarité. — Sais-tu ce que c’est que ton or, Bamboche ?… C’est du plomb. Tiens, regarde…

Et tenant sa petite main ouverte, elle nous montra une poignée de rouelles de plomb de la grandeur d’une pièce de vingt sous…

Au milieu d’elles, on apercevait le louis d’or bien brillant qui s’était d’abord offert à ma vue quand j’avais ouvert le rouleau.

Bamboche devint blême, et resta un moment pétrifié… Puis, saisissant le sac par le fond, il le vida sur l’herbe.

Une quinzaine de rouleaux tombèrent.

Bamboche se jeta à genoux, et les brisa tous alternativement par le mileu.

Hélas ! tous ne contenaient que des rouelles de plomb, comme le premier ; seulement dans quatre ou cinq de ces rouleaux cette singulière monnaie était cachée sous une pièce d’or.

Lorsque Bamboche se fut assuré que notre fortune colossale se bornait à trois ou quatre louis, il s’écria furieux :

— Brigand de la Levrasse…