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Page:Sue - Les misères des enfants trouvés I (1850).djvu/67

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CHAPITRE IV.

Une métairie en Sologne. — Repas des garçons et des filles de ferme. — Philosophie théorique et pratique de la Robin. — Une jeune fille charmée. — Devoirs des grands propriétaires.

Le soleil allait bientôt se coucher lorsque Beaucadet, accompagné de ses gendarmes, et résolu d’opérer l’arrestation de Bruyère, s’était dirigé vers la métairie du Grand-Genévrier, appartenant au comte Duriveau et dépendant de sa terre du Tremblay.

Il serait difficile de donner à ceux qui n’ont pas vu la plupart des métairies de cette partie de la Sologne la moindre idée du révoltant aspect de ces tanières fétides, délabrées, insalubres même pour des bestiaux, où végètent pourtant les métayers, leurs domestiques et leurs journaliers, presque toujours hâves et languissants ; car d’incessantes et terribles fièvres, causées par les exhalaisons délétères d’un terrain spongieux, imbibé d’eaux croupissantes, exténuent ces populations, affaiblies déjà par une détestable et insuffisante nourriture.

La métairie du Grand-Genévrier était ainsi nommée à cause d’un genévrier colossal, au moins deux fois centenaire, qui s’élevait non loin de ces bâtiments d’exploitation et du logement du fermier. Le tout se composait d’une espèce de parallélogramme de masures dégradées, crevassées, construites en pisé, sorte de mortier fait de terre et de sable auquel, lorsqu’il est à l’état liquide, on donne un peu plus de cohésion en y ajoutant du foin haché.

La toiture, effondrée en de nombreux endroits, était recouverte, ici de tuiles ébréchées, rongées par la mousse ou par la vétusté, là