Page:Sue - Les mystères de Paris, 10è série, 1843.djvu/119

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prince souverain que chacun bénit et révère ; moi jadis si misérable, je jouis de toutes les splendeurs du luxe et d’une existence presque royale ! Hélas ! que voulez-vous, mon père, ma fortune était si imprévue… votre puissance m’entourait d’un si splendide éclat, que j’étais excusable peut-être de me laisser aveugler ainsi.

— Excusable !… mais rien de plus naturel, pauvre ange aimé. Quel mal de t’enorgueillir d’un rang qui était le tien ? de jouir des avantages de la position que je t’avais rendue ? Aussi dans ce temps-là, je me le rappelle bien, tu étais d’une gaieté charmante ; que de fois je t’ai vue tomber dans mes bras comme accablée par la félicité, et me dire avec un accent enchanteur ces mots qu’hélas je ne dois plus entendre : Mon père… c’est trop… trop de bonheur !… Malheureusement ce sont ces souvenirs-là… vois-tu, qui m’ont endormi dans une sécurité trompeuse ; et plus tard je ne me suis pas assez inquiété des causes de ta mélancolie…