Page:Sue - Les mystères de Paris, 8è série, 1843.djvu/345

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sente à mon souvenir… Ce tableau d’une volupté terrible est là, toujours là… devant mes yeux… Qu’ils soient ouverts ou fermés par un assoupissement fébrile ou par une insomnie ardente, je vois toujours son regard noir et enflammé qui fait bouillir la moelle de mes os… Je sens toujours son souffle sur mon front… J’entends toujours sa voix…

— Mais ce sont là d’épouvantables tourments !

— Épouvantables ! oui, épouvantables !… Mais la mort ! mais le néant ! mais perdre pour toujours ce souvenir aussi vivant que la réalité, mais renoncer à ces souvenirs qui me déchirent, me dévorent et m’embrasent !… Non !… non !… non !… Vivre !… vivre !… pauvre, méprisé, flétri… vivre au bagne… mais vivre !… pour que la pensée me reste… puisque cette créature infernale a toute ma pensée… est toute ma pensée !…

— Jacques — dit Polidori d’un ton grave qui contrasta avec son amère ironie habituelle — j’ai vu bien des souffrances ; mais jamais tortures n’approchèrent des tiennes… Celui qui nous tient en sa puissance ne pou-