Page:Sue - Les mystères de Paris, 9è série, 1843.djvu/46

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chirant de votre fille !… Pauvre enfant ! souillée, mais non corrompue, chaste encore au milieu de cette horrible dégradation qui était pour elle un songe affreux ; car chaque mot disait son horreur pour cette vie où elle était fatalement enchaînée ; oh ! si vous saviez comme à chaque instant il se révélait en elle d’adorables instincts… Que de bonté… que de charité touchante ; oui… car c’était pour soulager une infortune plus grande encore que la sienne que la pauvre petite avait dépensé le peu d’argent qui lui restait et qui la séparait de l’abîme d’infamie où on l’a plongée… Oui ! car il est venu un jour… un jour affreux… où, sans travail, sans pain, sans asile… d’horribles femmes l’ont rencontrée exténuée de faiblesse… de besoin… l’ont enivrée… et…

Rodolphe ne put achever ; il poussa un cri déchirant en s’écriant :

— Et c’était ma fille !… ma fille !…

— Malédiction sur moi ! — murmura Sarah en cachant sa figure dans ses mains comme si elle eût redouté de voir le jour.

— Oui — s’écria Rodolphe — malédiction sur vous ! car c’est votre abandon qui a causé