Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 3-4.djvu/315

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» — Comment cela ?

» — Les mœurs, les usages, les lois… tout s’y oppose, — dit Claude Gérard.

» — La loi, les mœurs s’opposent à ce que vous éleviez vos écoliers en chrétiens ? — lui dis-je stupéfait de cette audace.

» — Oui, M. le curé, les lois s’y opposent.

» — Vous êtes fou !

» — Si j’élevais ces enfants selon les lois divines prêchées par le Christ, et propagées par ses apôtres, par les pères de l’église… au lieu de reprocher à mes écoliers d’avoir volé les fruits de M. le marguillier, je devrais leur dire : — Mes enfants, c’est M. le marguillier qui vous a volés en se réservant tant de fruits pour lui seul

» — Voilà qui est fort ! — s’écria Bouchetout furieux, — moi le propriétaire des fruits, je serais le voleur parce que je les garde ?

» — Précisément, Monsieur le marguillier, — répondit Claude Gérard avec son flegme insolent.

» Et prenant un livre sur la table, il ajouta :

» — Voici les gens que Saint Bazile-le-Grand considère comme voleurs :

» Qu’est-ce qu’un voleur ? C’est celui qui rapporte à lui seul les choses qui appartiennent à chacun. N’es-tu pas un voleur, toi qui te rends propres les biens que tu as reçus de Dieu que pour les répandre et les distribuer ? Si celui qui soustrait un habit, est appelé voleur, le possesseur qui s’abstient de couvrir un