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Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 3-4.djvu/345

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monde savait lire, — disaient ingénument ceux-là, — à quoi distinguerait-on l’enfant d’un homme qui a quelque chose, de l’enfant d’un homme qui n’a rien ? » Aussi ces vaniteux concouraient-ils de tout leur pouvoir municipal à rendre presque impossible l’école de Claude Gérard, le reléguant dans une étable infecte, malsaine, et défendant aux gens qu’ils pouvaient tenir dans quelque dépendance, d’envoyer leurs enfants à sa classe. Chez ces superbes personnages, notre collecte fut mince et presque toujours injurieusement donnée. Une moitié de pain d’une dureté de roche, quelque morceau de lard rance, ou quelque fromage moisi, telle fut à-peu-près notre récolte chez plusieurs notables du village.[1]

  1. Ces tristes tableaux des moyens d’éducation donnés aux populations agricoles, loin d’être exagérés, sont malheureusement bien au-dessous de l’effrayante vérité. Nous continuons de citer l’ouvrage officiel de M. Lorrain, pages 5, 6, et 156.

    « — Les leçons se donnent presque toujours dans des écuries malpropres, où l’on ne respire souvent qu’un air infect.

    » — En général les classes sont étroites et insalubres ; j’ai vu des enfants réunis dans une écurie, à côté des chevaux.

    » Souvent l’école se tient dans des écuries, des granges humides, des salles basses, des caves où l’on est obligé de descendre en rampant ; dans un local d’une petitesse incroyable, dont nous citerons un exemple : — l’école de P*** n’a que douze pieds carrés ; dans ce local se trouvent réunis, au fort de l’hiver, quatre-vingts élèves, lorsque cet amas d’enfants n’a d’autre secours pour respirer l’air qu’une croisée de la grandeur d’un carreau… Combien la privation d’un air pur doit-elle être plus préjudiciable encore à la santé de ces jeunes campagnards, arrachés à l’air libre des champs, et transplantés dans ces prisons étouffantes, dans ces cloaques étroits, infects, malsains, où le jour pénètre à peine, et qui offrent aux pieds nus des enfants un sol humide, sans carreaux, sans pavés…

    » ..... J’insisterai sur les rapports uniformes d’un grand nombre d’inspecteurs qui n’hésitent pas à voir dans ces