Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 3-4.djvu/65

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confiance, et je lui demandai où je pourrais trouver de l’occupation.

» Sa première question (et elle me fut répétée souvent) fut celle-ci :

» — Que savez-vous faire ? à quoi êtes-vous bon ?

» Ma réponse, aussi bien souvent répétée, fut celle-ci :

» — J’ai eu le second prix d’honneur, je sais très-bien le latin et le grec.

» — Alors montrez le latin et le grec, — me répondit très-sensément l’hôtelier.

» — À qui ?

» — Mon digne jeune homme, je n’en sais rien, cherchez… je m’occupe de mon garni, et non de trouver des élèves.

» Chercher… c’était facile à dire ; où cela ? pouvais-je chercher, et surtout trouver, avec mon manque complet de connaissance du monde et des gens ? Le conseil ressemblait à une mauvaise plaisanterie ; je ne pouvais demander au premier venu s’il voulait mes services.

» Je fis pourtant quelques tentatives, et m’adressai entr’autres à deux étudiants de mes voisins : L’un me donna sa parole d’honneur la plus sacrée qu’il me chargerait de montrer le grec au premier enfant mâle qu’il aurait de son étudiante ; l’autre me répondit qu’en fait de langues anciennes, il n’estimait que la savate et le cullotage des pipes.

» Honteux et craintif, je n’eus pas le courage d’affronter de nouvelles plaisanteries, de nouveaux mécomptes, et je retombai dans une apathie pareille à