Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 5-6.djvu/105

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Et, d’un geste, Balthazar indiqua à son ami un pot à pommade, au fond duquel croupissait une sorte de limon noirâtre… Telle était l’épaisse viscosité de cette chose, qu’une plume ébarbée, rongée, s’y trouvait encore plantée.

— Maintenant, du papier… — dit Robert de Mareuil, en cherchant en vain ce qu’il demandait sur la table du poète, et où se trouvaient en revanche une pantoufle, une carafe, une paire de pincettes et une redingote ; enfin, après de laborieuses recherches, les deux amis finirent par trouver une feuille de papier présentable ; l’encre fut convenablement délayée, le comte Robert de Mareuil se fit une place à l’un des bouts de la table si étrangement encombrée et se mit à écrire, tout en disant à son ami :

— Après tout, je ne sais pas trop si cette lettre me servira à grand’chose…

— D’abord, à qui écris-tu ?

— À mon cousin.

— Le baron de Noirlieu ?

— Lui-même…

— Et pourquoi ta lettre ne servirait-elle pas à grand’chose ?

— On dit que le baron est devenu à-peu-près fou.

— Ah bah ! Et pourquoi ?

— De chagrin…

— Quel chagrin ?

— Du chagrin dont Georges Dandin se plaignait à son beau-père et à sa belle-mère, — dit Robert de Mareuil, en regardant son ami d’un air d’intelligence.