Aller au contenu

Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 5-6.djvu/134

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Voyons, Martin, réponds, quel effet te fait ce nom : Basquine ?

La question fut si imprévue, mon saisissement tel, que je reculai d’un pas en regardant le poète avec stupeur.

— Vois-tu, — s’écria Balthazar triomphant, — quand je te dis qu’il y a des noms fulgurants même pour les natures les plus rebelles à toute électricité morale.

Robert de Mareuil haussa les épaules.

Mon premier étonnement passé, je sentis tout le danger qu’il y aurait pour moi à inspirer la moindre défiance à mes nouveaux maîtres. Je ne sais quelle inspiration me dit que, dans cette circonstance, je ne pouvais agir plus adroitement qu’en disant à peu près la vérité ; aussi je répondis :

— Ah ! mon Dieu ! Monsieur… ce nom… si vous saviez…

— Ce nom t’éblouit, n’est-ce pas ? — s’écria le poète, — il miroite à tes yeux comme une jupe rose étoilée d’argent… Ce nom brille, tourne, fourmille à ton esprit comme un tourbillon de paillettes d’or, hein ?

— Non, Monsieur, ce n’est pas cela, — lui dis-je ; — mais ça m’a fait un grand saisissement, quand vous m’avez dit ce nom…

— Et pourquoi ? — me demanda Balthazar, pendant que le comte frappait du pied avec une impulsion croissante.

— Étant enfant, Monsieur, — répondis-je au poète, — j’ai connu une petite fille à qui on avait donné ce