Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 5-6.djvu/99

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tera bon… cent louis de plus à chacun par manuscrit ! Est-ce assez, Martin ? cent louis ?

— Monsieur…

— Tu es naïf, tu es vrai, tu es désintéressé dans la question, Martin ! cent louis, est-ce assez ? Je me plais à te faire l’arbitre de la bourse de ces pharisiens… veux-tu que je les impose à deux cents louis ?

— Oh ! Monsieur…

— Va donc pour cent louis… Tu es clément, jeune homme ! tu es grand !… C’est donc neuf cent louis en or que tu me rapporteras demain… car ils les liront, mes poèmes, ces brutes, je t’en réponds, ils les liront, séance tenante ; j’ai un moyen infaillible pour cela. Reviens demain matin de bonne heure… je veux avoir mes fonds avant deux heures… il y aura vingt-cinq louis pour toi… une petite fortune… tu achèteras un petit fonds… de ce que tu voudras. Tu peux devenir millionnaire, Martin… Jacques Laffitte est venu à Paris avec deux louis… dans sa poche… tu en as vingt-cinq… tu peux donc devenir vingt-trois fois plus riche que Jacques Laffitte… C’est gentil ! Et voilà comme quoi les bons commissionnaires sont récompensés… Vingt-trois fois plus riches que Jacques Laffitte… À demain, Martin ; prends mes bottes… ne les chatouille pas trop fort avec ta brosse… car il y a une de ces deux orphelines qui rit déjà beaucoup trop à travers l’empeigne… À demain, mon garçon.

Toutes ces folies sur la fortune qui m’attendait, étaient dites sérieusement et avec foi par Balthazar. Dans l’exaltation de sa puissante imagination, l’espérance la plus insensée devenait pour lui une réalité…