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Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 7-8.djvu/208

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— Ce langage, elle me l’a tenu à-peu-près hier, — dit le prince avec une rage concentrée, — mais demain aussi… je tuerai celui qui m’a ravi le cœur de ma femme. Je serai ridicule aux yeux des gens de bonne compagnie… je le sais… mais il y a trop long-temps que cette lâche appréhension me fait dévorer ma jalousie… La vengeance me sauvera du ridicule.

— Stérile vengeance, Monsieur : si elle s’accomplit, elle changera en haine incurable l’estime que Mme de Montbar peut avoir conservée pour vous.

— Eh bien ! elle et moi nous serons malheureux ; j’aime mieux cela que la vue de son bonheur insolent.

— Ne vaudrait-il pas mieux être heureux… elle et vous ?

— Que voulez-vous dire ?

— Afin de vous montrer, Monsieur, de quelle importance est notre entretien, afin de vous donner, en un mot, une confiance absolue dans mes paroles… une dernière question : Savez-vous de quel prix serait pour Mme de Montbar la preuve matérielle, irrécusable de l’innocence de sa mère ?

— Pour une telle preuve, — s’écria le prince, — Mme de Montbar donnerait la moitié de sa vie.

— Eh bien ! Monsieur, ces preuves… je les possède…

— Vous ?

— Je les ai là !… sur moi !

— Vous, — répéta le prince avec une stupeur croissante.

— Ces preuves, je les ai là, dans ce portefeuille…