Page:Sue - Martin l'enfant trouvé.djvu/318

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Le comte bondit, comme s’il eût été mordu par un serpent ; l’indignation, le courroux, l’horreur éclatèrent à la fois sur ses traits jusqu’alors empreints d’une feinte cordialité.

— Il est donc vrai… Cette horrible créature dont vous avez pris à dîner la défense contre moi… vous la connaissez ?

— Depuis un mois, j’ai cet honneur… je ne voulais pas te dire cela ce soir devant tes électeurs.

— Ainsi, — s’écria le comte avec un redoublement d’effroi, — vous connaissez ce monstre de cupidité, de dépravation, de noirceur et d’hypocrisie…

— Jaloux… — dit Scipion en haussant les épaules ; — je t’aurais bien présenté… mais je te savais si amoureux…

— Et cette horrible créature… vous l’aimez, peut-être…

— Comme un fou. — Et les traits charmants de Scipion se colorèrent légèrement, ses grands yeux bruns rayonnèrent. — Et ce que j’adore en elle, n’est pas son merveilleux et double talent de danseuse et de chanteuse, je laisse ces admirations aux frénétiques de notre avant-scène… ce que j’adore dans Basquine,… le sais-tu ?… c’est ce que tu lui reproches ainsi que tant d’autres, mais, sans preuves, elle est trop superbement rouée pour en laisser ; ce que j’adore en elle, c’est sa dépravation enragée, son esprit audacieux, infernal, si admirablement caché par sa magnifique hypocrisie qui la fait passer pour un ange et lui ouvre le salon des femmes les plus prudes… des altesses et des impératrices… Eh bien ! à moi,… à moi seul Basquine a avoué ses